Édito - Au bout de la haine : Aboubakar Cissé, une tragédie qui appelle à la responsabilité
- leabalage
- 21 mai
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e meurtre d’Aboubakar Cissé nous confronte à une vérité brutale. Celle d’une société traversée par des tensions profondes, où l’appartenance réelle ou supposée à une religion suffit désormais à exposer au rejet, à la stigmatisation et parfois, à l’irréparable. Ce drame n’est pas une aberration isolée.
Il est l’aboutissement d’un climat délétère, nourri année après année par des discours de division, des politiques discriminantes, et une indifférence coupable face à la montée de la haine islamophobe.
Dans la République, la foi, quelle qu’elle soit, ne devrait jamais être un motif de suspicion. Être musulman ne devrait pas être une épreuve. La laïcité, telle qu’elle est inscrite dans notre droit, n’est pas un outil d’exclusion, mais une promesse de protection. Elle garantit à chacun la liberté de croire ou de ne pas croire, dans le respect mutuel. La détourner pour justifier la marginalisation de millions de nos concitoyens, c’est trahir son esprit autant que sa lettre.
Ce meurtre, aussi glaçant soit-il, ne doit pas être regardé comme un simple fait divers. Il nous oblige à une introspection collective. Car que dit-il de notre société ? De notre capacité à faire vivre les principes que nous proclamons ? De notre refus, trop souvent, de reconnaître que l’islamophobie tue, invisibilise, isole ?
Il y a, aujourd’hui, une urgence démocratique et humaine à recréer du lien.
À renouer avec l’idéal républicain du vivre-ensemble, fondé sur l’égalité réelle, la dignité partagée et le respect inconditionnel des droits fondamentaux. Trop de nos concitoyens vivent dans l’angoisse d’être désignés, discriminés, agressés, en raison de leur nom, de leur apparence, de leurs pratiques culturelles ou religieuses. Cette réalité, si nous la tolérons, affaiblit notre pacte social et érode la cohésion nationale.
Face à cela, le silence n’est plus possible. Nous devons affirmer clairement que la République ne peut rester muette devant l’injustice. Qu’elle doit se montrer ferme face à toutes les formes de racisme.
Il ne peut y avoir de République forte sans une République juste.
Nous avons le devoir de dire à tous les Aboubakar de France qu’ils ne sont pas seuls. Que leur place est ici, pleinement, dignement, sans condition. Qu’ils sont la République, au même titre que tous les autres.
Car il ne suffit pas de proclamer des valeurs : encore faut-il les incarner, à travers l’éducation, la justice, les politiques publiques, les choix symboliques. L’heure est venue de cesser de tolérer l’intolérable. Et de bâtir, enfin, une société à la hauteur de ses principes.

