Lettre aux habitant·es de ma circonscription avant mon vote contre la confiance à François Bayrou.
- leabalage
- 7 sept.
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Dernière mise à jour : 8 sept.
Chers concitoyens, chères concitoyennes,
Le 25 août, François Bayrou a acté la fin de son gouvernement en annonçant un vote de confiance. Comme vous avez pu en être informé, je ne vais pas voter en faveur de la reconduction du gouvernement. Les engagements pris devant les habitants et les habitantes de la 3e circonscription de Paris en juillet 2024 me le demandent, ma responsabilité me l’impose. Consciente des inquiétudes et interrogations qui peuvent légitimement émerger face à cette nouvelle période d'instabilité politique, je tiens ici à vous exposer les raisons de ma défiance envers le gouvernement de François Bayrou et les perspectives qui se dessinent pour sortir de cette crise politique.
Depuis mon élection il y a un an, je suis aux premières loges d’un spectacle inquiétant : le gouvernement, dirigé par François Bayrou et Emmanuel Macron, président de la République, sacrifie l’écologie et la justice sociale pour un accord politique avec la droite et l’extrême droite.
Cet accord du gouvernement s’est illustré par des attaques répétées et sans précédent contre l’écologie et la science, dont la loi Duplomb est l'exemple le plus parlant. Adoptée grâce au soutien des Républicains et du Rassemblement national, elle prévoyait la réintroduction d’un insecticide mortel pour les pollinisateurs et cancérigène pour l’humain. Heureusement, le Conseil Constitutionnel a censuré cette disposition, qui ne sera donc pas appliquée.
Outre les attaques contre notre santé et l’écologie, les victoires concédées à l’extrême droite sont légions : lois xénophobes, contestations à peine cachées de la décision de justice concernant Marine Le Pen et de son exécution provisoire, et nomination de ministres remettant ouvertement en question ouvertement notre démocratie et l’Etat de droit. Mon vote de défiance vient donc sanctionner cette alliance, qui constitue une trahison des électeurs et électrices s’étant mobilisés massivement pour empêcher l’accession du Rassemblement National au gouvernement.
Ce vote de confiance a été orienté par le Premier ministre autour de la situation alarmante de nos finances publiques et de la difficulté constatée à réduire le déficit public. Non seulement, nous contestons le constat établi par le Premier ministre, mais nous refusons l’idée qu’il faudrait donner la confiance à un gouvernement responsable de la situation qu’il prétend combattre.
Depuis plusieurs années, le narratif d’un endettement devenu insupportable est régulièrement développé par les responsables politiques afin de justifier les politiques budgétaires austéritaires successives. Ces discours reprennent des idées et cadres de pensée largement remis en question par les économistes eux- même. L’Etat, contrairement aux ménages, ne rembourse pas sa dette, mais emprunte pour financer les créances déjà contractées. Il ne supporte ainsi que la charge de sa dette - autrement dit les intérêts. Malgré l’augmentation de la charge de la dette suite à la dissolution précipitée du président de la République en juin 2024, son coût reste inférieur à sa moyenne historique (Ameco).
Contrairement aux dires du Premier ministre, la France ne risque pas une mise sous tutelle du Fond monétaire international. Pour autant, la dynamique de notre déficit qui se creuse, notamment en 2023 et 2024 du fait de mauvaises prévisions du gouvernement, est un sujet que nous n’éludons pas. Nous considérons, comme le souligne l’Office français des conjonctures économiques, que c’est la politique fiscale mise en place depuis 2017 qui a creusé le déficit, et non une envolée des dépenses. En ce sens, les orientations budgétaires proposées par François Bayrou sont particulièrement injustes. Il fait peser le poids de l’austérité sur la partie de la population qui n’a pas profité des mesures fiscales depuis 2017.
La confiance ou le chaos : tel est le narratif qu’il tente de nous imposer. Pourtant, c’est bien son camp politique qui nous précipite dans le chaos, refusant d’admettre trois réalités qui se sont dégagées du scrutin des dernières législatives un rejet massif du Rassemblement national auquel les Français·es ont bloqué l’accès à Matignon ; le rejet de la politique d’Emmanuel Macron, qui a perdu 166 député·es entre 2017 et 2024 ; une Assemblée plurielle, où aucun groupe politique ne dispose d’une majorité. L’instabilité perdurera tant que les gouvernements nommés ne tiendront pas compte de cette nouvelle réalité politique.
Après 8 ans d’hyperprésidentialisme, nous devons donner le pouvoir au Parlement. Mon groupe, le groupe Écologiste et Social, a fait la démonstration à de nombreuses reprises, et sur de nombreux sujets, qu’il était possible de faire adopter des textes significatifs dans cette Assemblée plurielle. A titre d’exemple, nous avons fait adopter la garantie d’un revenu digne pour les agriculteurs et agricultrices, l’amélioration de la protection de la population face aux risques liés aux polluants éternels ou encore le renforcement du contrôle du Parlement en période d’expédition des affaires courantes. Loin des débats des plateaux de télévision, la gauche sait unir ses 192 voix pour faire avancer ses idées. À l’Assemblée, la coalition tient.
Pour tenir dans la durée, ce gouvernement devra donc rétablir le barrage républicain, rompre avec la politique menée par Emmanuel Macron depuis 2017, et, dès son installation s’en remettre à l’Assemblée, par un vote de confiance afin d’ouvrir le dialogue avec tous les groupes républicains. Une ouverture qui devra durer dans le temps grâce au renoncement au 49-3.
Un gouvernement de gauche ne peut devenir le gilet de sauvetage d’une politique macroniste sans soutien populaire. Il doit concrétiser en acte et en vote les promesses du 7 juillet 2024 : justice sociale, transition écologique et protection des libertés fondamentales.

